Archives de Catégorie: Psychologie

Expériences de Carl Jung au Nouveau Mexique et au Kenya

Taos Pueblo
by (
Luca Galuzzi)

Jung raconte dans ce premier extrait une conversation qu’il a eue avec Mountain Lake, un chef Indien Taos Pueblos pendant son voyage au Nouveau Mexique en 1924.

Extrait de C. G. Jung, ‘Ma vie, Souvenirs, rêves et pensées’, recueillis et publiés par Aniéla Jaffé

(Mountain Lake dit 🙂 «  Les Américains veulent interdire notre religion. Pourquoi ne peuvent-ils pas nous laisser tranquilles ? Ce que nous faisons n’est pas seulement pour nous, mais aussi pour les Américains. — Et même nous le faisons pour le monde entier. Tout le monde en profite. ”

Je vis bien à son agitation qu’il faisait allusion à quelque élément très important de sa religion. Aussi lui demandai-je : “ Pensez-vous que vos pratiques religieuses profitent au monde tout entier ? ” II répondit avec beaucoup de vivacité : “ Naturellement, si nous ne le faisions pas, que deviendrait le monde ? ” Et d’un geste chargé de sens celui qui parlait montra le soleil.

Je sentis qu’ici nous arrivions dans un domaine très délicat qui touchait aux mystères du clan. “ Après tout, nous sommes un peuple, dit-il, qui demeure sur le toit du monde ; nous sommes les fils de notre Père, le Soleil, et grâce à notre religion, nous aidons quotidiennement notre Père à traverser le ciel. Nous agissons ainsi non seulement pour nous, mais pour le monde entier. Si nous arrêtions nos pratiques religieuses, dans dix ans le Soleil ne se lèverait plus. Ce serait la nuit à jamais. ”

Alors je compris sur quoi reposait la “ dignité ”, la certitude sereine de l’individu isolé : il est le fils du Soleil, sa vie a un sens cosmologique : n’assiste-t-il pas son Père — qui conserve toute vie — dans son lever et son coucher quotidiens ?

Jung raconte et commente dans ce deuxième extrait sa prise de conscience de la place de l’homme dans le cosmos et la finalité de la vie humaine. Cela s’est passé pendant son voyage au Kenya et en Uganda en 1925.

Plains of Kenya
Image Source: https://kenyatanzaniasafari.com/

« Partant de Nairobi, nous visitâmes dans une petite Ford les Athi Plains, grande réserve de gibier. Sur une colline peu élevée, dans cette vaste savane, un spectacle sans pareil nous attendait. Jusqu’à l’horizon le plus lointain nous aperçûmes d’immenses troupeaux : gazelles, antilopes, gnous, zèbres, phacochères, etc. Tout en paissant et remuant leurs têtes, les bêtes des troupeaux avançaient en un cours insensible — à peine percevait-on le cri mélancolique d’un oiseau de proie : c’était le silence du commencement éternel, le monde comme il avait toujours été dans l’état de non-être ; car jusqu’à une époque toute récente personne n’était là pour savoir que c’était “ ce monde ”. Je m’éloignai de mes compagnons jusqu’à les perdre de vue. J’avais le sentiment d’être tout à fait seul. J’étais alors le premier homme qui savait que cela était le monde, et qui par sa connaissance venait seulement de le créer réellement.

C’est ici qu’avec une éblouissante clarté m’apparut la valeur cosmique de la conscience : Quod natura relinquit imperfectum, ars perficit (“ Ce que la nature laisse incomplet, l’art le parfait ”), est-il dit dans l’alchimie. L’homme, moi, en un acte invisible de création, ai mené le monde à son accomplissement en lui conférant existence objective. On a attribué cet acte au seul créateur, sans prendre garde que, ce faisant, on ravale la vie et l’être, y compris l’âme humaine, à n’être qu’une machine calculée dans ses moindres détails qui continue sur sa lancée, dénuée de sens, en se conformant à des règles connues d’avance et prédéterminées.

Dans la désolation d’un tel mécanisme d’horlogerie, il n’y a plus de drame de l’homme, du monde et de Dieu ; plus de “jour nouveau” qui mènerait à des “rives nouvelles”, mais simplement le désert de processus calculés d’avance. Mon vieil ami Pueblo me revint en mémoire: il croyait que la raison d’êtrede ses Pueblos était le devoir qu’ils avaient d’aider leur Père le Soleil à traverser chaque jour le ciel. J’avais envié chez eux cette plénitude de sens et recherché sans espoir notre propre mythe. Maintenant je l’appréhendais, et je savais en outre que l’homme est indispensable à la perfection de la création, que, plus encore, il est lui-même le second créateur du monde ; l’homme lui donne pour la première fois l’être objectif — sans lequel, jamais entendu, jamais vu, dévorant silencieusement, enfantant, mourant, hochant la tête pendant des centaines de millions d’années, le monde se déroulerait dans la nuit la plus profonde du non-être pour atteindre une fin indéterminée. La conscience humaine, la première, a créé l’existence objective et la signification et c’est ainsi que l’homme a trouvé sa place indispensable dans le grand processus de l’être.»

Plus loin dans cette autobiographie, Jung détaille en quoi consiste ‘la tâche majeure’ ou ‘la vocation’ de l’existence humaine

« La tâche majeure de l’homme devrait être… de prendre conscience de ce qui, provenant de l’inconscient, se presse et s’impose à lui, au lieu d’en rester inconscient ou de s’y identifier. Car, dans ces deux cas, il est infidèle à sa vocation, qui est de créer de la conscience. Pour autant que nous soyons à même de le discerner, le seul sens de l’existence humaine est d’allumer une lumière dans les ténèbres de l’être pur et simple. II y a même lieu de supposer que, tout comme l’inconscient agit sur nous, l’accroissement de notre conscience a, de même, une action en retour sur l’inconscient.

Extrait de C. G. Jung, ‘l’Âme et la Vie’, Le conscient et l’inconscient

« Mais pourquoi diable, allez-vous certainement demander, l’homme doit-il à tort et à travers atteindre une plus haute conscience ? Avec cette question vous touchez le centre du problème et la réponse ne m’est pas aisée. C’est une profession de foi. Je crois qu’il fallait que quelqu’un finisse par savoir que ce monde merveilleux des montagnes, des mers, des soleils et des lunes, de la voie lactée et des nébuleuses d’étoiles fixes, a son existence. Alors que je me trouvais sur l’Athi Plains en Afrique Orientale, debout sur une petite colline, et que je voyais paître des troupeaux sauvages de plusieurs milliers de têtes, sans un bruit, éventés par le souffle du monde primitif, tels qu’ils l’avaient toujours fait depuis des temps immémoriaux, j’avais le sentiment d’être le premier homme, le premier être, le seul à savoir que tout cela existait. Tout ce monde autour de moi était encore dans la paix du début et ne savait pas qu’il existait. Au moment même où je le contemplais le monde était devenu et sans ce moment il n’aurait pas été. Toute nature tend à cette fin; elle la trouve remplie en l’homme, et toujours uniquement dans l’être humain le plus conscient et le plus évolué. »

Merci de partager les commentaires que suscitent en vous ces quelques extraits de l’oeuvre de Jung ! Bonne lecture !

Svadharma et Légende personnelle

Offrande de fleurs à GangaOffrande de fleurs à Ganga

Voici des extraits d’un échange récent que j’ai eu avec Julien qui vit à Vancouver, Canada. La question de Julien porte la perspective de la Bhagavad Gita sur le svadharma, ‘mettant l’accent sur le devoir personnel’, et la perspective de ‘l’Occident’, qui met l’accent sur la mission ou ‘sur la vocation unique de chacun’.

Est-il possible de réconcilier ces deux approches? Autrement dit, l’enseignement de la Gita (et du Vedanta) est-il pertinent pour la société moderne ?

5 Mars 2012 – Julien

Dans la Bhagavad Gita (III.35 et XVIII.47), la notion de svadharma équivaut à celle de devoir individuel, auquel l’individu en quête de réalisation spirituelle doit se soumettre, même s’il doit transcender ses préférences personnelles.

En Occident, cependant, la notion de svadharma est souvent présentée comme équivalent à celle de mission ou de vocation personnelle: chacun doit trouver la manière unique d’exprimer ses talents, au service des autres.

Comment réconcilier ces deux perspectives sur le svadharma, l’une mettant l’accent sur le devoir personnel, l’autre sur la vocation unique de chacun?

Sincères salutations, Julien

08 Mars 2012 – Surya

Je ne vois pas d’incompatibilité entre ces deux perspectives. Pour le Vedanta, le svadharma est une manière dynamique de vivre en harmonie avec l’ordre des choses, en étant éveillé à la présence de notre inter connexion avec les autres êtres vivants. Des situations différentes émergent, se manifestent  chaque instant dans notre vie et nous devons sans cesse faire des choix. Ces choix débouchent sur des actions de notre part et quand mes actions sont alignées avec l’ordre universel du dharma plutôt que dictées par mes envies ou préférences individuelles, on peut dire que j’accomplis mon svadharma.

Plus précisément, chaque situation contient en quelque sorte un script pour l’acteur, un rôle que je dois jouer de manière la plus juste, appropriée possible, en m’aligant sur le dharma. Les situations changent, et mes rôles changent. Quand je suis avec mes enfants, mon svadharma en tant que père est évident de lui-même. De la même manière, je joue aussi les rôles de membre d’une communauté, d’employé ou d’entrepreneur dans une entreprise, au sein d’une nation en tant que citoyen, etc. Les scripts de ces différents rôles ne présentent pas de difficulté à priori et doivent parfois faire l’objet d’une interprétation attentive. Chaque situation si elle est vue de manière objective, me dictent en effet ce qui doit être fait par moi dans le cadre des valeurs éthiques universelles (dharma) ou parfois juste de ce qui est approprié.

Votre remarque sur la notion de svadharma en Occident est juste. En effet, toute la vision du dharma reposait en Inde sur le système des varnas et asramas ie qui avaient chacun leur propre dharma, devoirs. Varna est la division de la société en groupes (brahmana, ksatriya, vaisaya, sudra) qui ont un domaine d’action spécifique (karma) et donc des devoirs (dharma) qui se conforment au tempérament, aux qualités requises pour accomplir ces actions. Les asramas incluent les étapes de la vie, étudiant, maitre de maison, etc. car il est clair que mes responsabilités diffèrent aussi en fonction des étapes de ma vie, au sein même d’un varna. Cette division de la société n’a pas cours en Occident en tout cas sous cette forme. Car ce n’est pas parce que je suis le fils d’un médecin ou d’un avocat que je vais devenir à mon tour un médecin ou un avocat. Mon svadharma qui était clair dans la société indienne ne l’est pas en occident. Chacun est encouragé comme vous le soulignez à trouvez sa vocation personnelle sans obligation de reprendre le métier de sa famille. L’individualisme a en quelque sorte primeur sur l’appartenance à un groupe qui avait ses spécificités, ses devoirs particuliers.

 Dans ce cas et je vous le concède, même s’il n’est pas toujours facile de trouver sa vocation, la notion de svadharma est applicable. Si je suis un danseur par exemple je peux parfaitement inscrire ce métier dans un cadre qui est la recherche de ma contribution à la société. Les formes de cette contribution peuvent varier, je peux donner des cours de danse à des déshérités dans des quartiers difficiles ou donner une partie de mes revenus à ceux qui en ont besoin. Ne pas être juste motivé par ma carrière personnelle ou ma gloire en tant que danseur, mais contribuer à la société à ma manière, en fonction de mes talents et de ma sphère d’influence. L’attitude fait la différence et elle émane d’une certaine compréhension des choses. Un dirigeant d’entreprise aura ainsi comme svadharma non seulement de contenter ses actionnaires et de faire du profit, ce qui est parfaitement légitime et souhaitable, mais aussi de veiller à l’impact de ses actions sur l’environnement, le bien être de ses employés, etc.

Je deviens un contributeur et un véritable participant à la société à laquelle j’appartiens. Je peux ainsi contribuer sous différentes formes car je suis conscient que tout ce que j’ai reçu, mon éducation, mes talents, ma position financière, etc. m’a été donné par la société à laquelle j’appartiens. C’est à dire je reconnais que tant de gens différents, organisations , etc. m’ont donné une chance, m’ont élevé, instruit, etc. et ont compté pour moi à un moment donné de ma vie.

Finalement, pour élargir ce propos, on peut remarquer que la culture Indienne exprime par ses formes religieuses cette vision d’un ordre qui résulte d’une intelligence présente en toutes choses. C’est cela qui fonde mon interconnexion avec le reste de l’univers et ma place au sein du tout. Il y a en effet trois yajnas, prières faites tous les jours pour honorer et signifier mon appréciation mature et objective de ma position au sein de ce tout. J’exprime ma reconnaissance aux pitrus, mes ancêtres, qui ont fait de moi ce que je suis ; les devas, toutes les forces dans la nature qui sont la manifestation de lois physiques, biologiques, etc . émanant de l’intelligence présente dans l’univers qui maintiennent l’infrastructure nécessaire à ma vie en tant qu’individu; et les bhutas, tous les êtres vivants, humains, plantes (source de nourriture, d’oxygène, etc.) qui font de moi ce que je suis, à chaque instant que je vis.

Cette appréciation de ma place en tant qu’individu au sein du tout, qui fonde le svadharma, quand elle est comprise, n’est pas spécifique à une culture donnée car c’est une réalité que je peux comprendre, assimiler et intégrer dans ma vie, où que je me trouve.

Merci Julien pour votre question ! Bien à vous, Surya

23 Mars 2012 – Julien

J’apprécie que vous souligniez que le svadharma est une manière dynamique de vivre sa vie, en étant en harmonie avec l’ordre des choses. Si je comprends bien, la vie nous propose constamment des occasions de choisir les actes appropriés; c’est dans la mesure où l’on choisit une action alignée sur le Dharma (l’ordre universel) plutôt que sur nos préférences (lesquelles peuvent justement contredire le Dharma), que l’on actualise notre svadharma. Cette lecture me semble consistante avec les enseignements de la Bhagavad Gita. Comme vous l’écrivez, chaque situation contient un script pour l’acteur, lequel ne présente pas de difficulté à priori. J’en déduis que ce sont nos attitudes intérieures et notre subjectivité à l’égard du script (résistance, jugement, préférences, etc.) qui engendrent notre souffrance. Ainsi, il est vrai, lorsque la situation est acceptée telle qu’elle est, objectivement, l’action requise s’impose naturellement. Ceci correspond pour l’essentiel à la vision traditionnelle du svadharma.

En Occident, comme vous le soulignez, cette vision traditionnelle du svadharma a également cours (sinon, elle ne serait pas universelle, simplement locale et temporaire) mais elle est brouillée par l’accent mis sur la liberté de choix individuel. Vous resituez alors le svadharma sur le plan de la vocation personnelle, laquelle doit s’exprimer en harmonie avec la société, dans un désir de contribuer positivement à la vie des autres. Il n’est ainsi nullement question de vivre égoïstement. Vivre son svadharma, c’est apporter sa contribution unique à la société, dans le respect de ses obligations et de ses devoirs envers les autres (interconnexion) d’une part, de ses talents innés et de sa nature propre d’autre part.

J’avoue que l’équation n’est pas simple à résoudre. Autant au quotidien il est possible et souhaitable de vivre en harmonie avec les défis proposés par la vie et y apporter les solutions éthiques qui en découlent, autant par moments c’est beaucoup plus difficile (à l’image du découragement d’Arjuna). Il y a tant de gens qui font de leur mieux et s’acquittent de leurs devoirs honnêtement, tout en ayant le sentiment de passer à côté d’eux-mêmes, de leur vocation. Ils ne sont pas épanouis. Est-ce que leur souffrance est liée à un manque d’acceptation (ou de surrender) à l’ordre des choses ou est-il l’expression d’un déficit dans l’accomplissement de leur svadharma (lequel recouvre, si je comprends bien, à la fois les obligations envers les autres et envers sa nature propre)? Le fait même de parler de vocation n’est-il pas un luxe car cela n’a rien d’universel: tant de gens sont condamnés à des existences de survie et de dur labeur.

Merci pour à nouveau pour votre excellente réponse.

Amitiés, Julien

Pour en savoir plus sur le Vedanta

1. Voir les vidéos 14 et 16 de la série de 23 vidéos sur l’enseignement de la Bhagavad Gita par Neema Majmudar disponible sur Youtube avec des sous-titres en français.

Vidéo 16 : L’action comme offrande rituelle

Vidéo 14: Le Yoga de l’Action (karma yoga)

2. Voir la Série de 4 vidéos Sagesse et Art de vivre selon la Bhagavad Gita par Surya Tahora en français sur Youtube.

3. Sur le site ‘Le Vedanta, Découvrir ce qui est’

Voir les pages: Devenir un individu mature ; L’individu et le tout 

Transformation et connaissance de soi

A l’occasion de mon passage à l’Ile de la Réunion entre le 22-28 Août 2011, j’ai eu l’opportunité de donner une série de conférences d’Introduction au Vedanta, avec pour titre: L’enseignement de la non dualité (Advaita Vedanta), Une tradition spirituelle pour notre temps

L’une d’entre elles qui a pour thème ‘Transformation et connaissance de soi’ est visible sur Youtube. Elle a été découpée en 4 parties de 30 minutes chacune. La transformation de soi est abordée à deux niveaux.

Relatif avec la découverte du grand ordre des choses que présente le Vedanta et ses implications sur la manière dont nous pouvons vivre notre vie, en tant qu’individu relié au tout, éveillé à la présence de cet ordre qui imprègne l’ensemble de l’univers à différents niveaux (physique, biologique, psychologique, épistémologique, etc.)

Le niveau absolu (la vision de l’Un non duel, libre de toute limitation que nous sommes en réalité, dépassant en cela la relation individu/tout) est abordé en fin de conférence dans les parties 3 et 4 qui inclut un dialogue avec les participants.

Accepter le passé (2)- Une méditation et prière par Swami Dayananda Saraswati

Pour faire suite à mon billet précédent sur le processus qui conduit à l’acceptation du passé, une nécessité soulignée par la psychologie et par toutes les traditions spirituelles, voici une seconde méditation et prière de Swami Dayananda Saraswati à ce sujet :

O Seigneur, je te demande de l’aide
Pour être capable d’accepter mon passé.
Le passé n’est pas le méchant de l’histoire,
Et ne doit pas être considéré avec mépris.
Le passé a fait de moi ce que je suis maintenant.

Chaque expérience était une source d’enrichissement.
Le problème ne vient pas du fait que j’ai un passé
Mais de ce que je me vois comme une victime du passé
Parce que je l’accepte pas.

Que cela devienne clair pour moi.
Je ne hais pas mon passé.

Dans la haine, il y a déni, rejet du passé. Je ne peux renier mon passé et encore moins le rejeter. Le passé est ce qu’il est, c’est un fait déjà accompli. Je ne peux absolument rien y changer, c’est un fait. Le problème est que lorsque je rejette le passé, lorsque j’éprouve du ressentiment envers le passé, je ne l’accepte pas.

Lorsque je me critique, je critique le passé. Cela veut dire que je ne l’accepte pas. Plus je vois que le passé ne peut pas changer, plus je me libère de mon ressentiment, ma rancoeur, mon animosité, ma colère, mes remords, mes regrets, etc.

Nous dépensons notre temps et notre énergie à éprouver de la colère contre le passé. Je demande de l’aide car c’est une chose de comprendre le passé mais une  autre d’être libre de tout ressentiment et de rancune envers lui. La prière agit car il y a soumission, reddition.

La prière est elle-même une action et son résultat s’appelle la grâce Je crée la grâce. Je n’attends pas que la grâce vienne à moi. Je l’invoque par la prière. La prière produit aussi un résultat parce qu’il y a une acceptation de mon impuissance dans la soumission.

Si je comprends comment je ne peux rien changer à mon passé, pourquoi se fait-il que je sois en colère ? Pourquoi ai-je tant de haine envers moi-même ? Pourquoi tant de critiques envers moi-même ? Je suis impuissant, isolé, seul, dépourvu de ressources. Mon effort, ma volonté entre en jeu dans la reconnaissance de mon impuissance et dans ma capacité à prier. Ma volonté est utilisée de manière réfléchie pour me soumettre. Dans cette soumission, c’est la volonté qui est soumise, et pour soumettre et suspendre ma  volonté, j’utilise ma volonté.

Il faut voir la beauté de la prière. II n’y a aucune méditation, aucun rituel, sans prière. Nulle technique ne peut remplacer la prière car dans toute technique, la volonté est toujours là. Ici, la volonté se soumet volontairement et cette soumission accomplit des miracles. Dans la soumission elle-même, il y a acceptation. Comprenez que dans la soumission, il y a acceptation du passé.

Je ne change pas l’esprit qui se critique lui-même. Je ne veux pas d’un esprit qui ne critiquera pas les autres ou moi-même. Ce n’est pas là le problème pour moi. Tout ce que je veux, c’est d’accepter cet esprit, de pouvoir accepter l’esprit qui se critique, se fustige, se juge lui-même.

Quand je dis que j’accepte mon passé, alors j’accepte les conséquences du passé. Le résultat du passé est l’auto-critique. J’accepte l’esprit tel qu’il est, les pensées telles qu’elles sont. Je n’ai pas peur de ce mental qui se juge lui-même, de ce mental qui se condamne lui-même. Je recherche la capacité d’accepter totalement ces pensées auto­critiques.

O Seigneur, aide-moi à accepter
Cet esprit qui se juge, se critique,
Se condamne et se lamente sur lui-même.

Aide-moi, je t’en prie.
Je soumets ma volonté
Car j’ai essayé d’utiliser ma volonté pour changer.

Cela n’a pas marché. Cela ne marchera jamais.
Alors, j’abandonne.

Je n’abandonne pas par impuissance,
Je m’abandonne à toi de manière réfléchie
Je m’en remets à toi
Je livre ma volonté dans tes mains.

Je n’ai aucune raison de désespérer.
Tout ce que je veux c’est d’accepter ce passé et ses conséquences.

Je ne tente pas d’éviter ces pensées auto-critiques,
Je ne cherche pas ta grâce pour les éliminer.
Donne moi Ta grâce pour accepter toutes ces pensées.

Pour aller plus loin

Quelques liens vers le site, Vedanta, Découvrir ce qui est:

[1] La maturité et la connaissance, Devenir un être humain mature

[2] La maturité et la connaissance, L’individu et le tout

[3] Article en pdf, La vision védique de Dieu

[4] Article en pdf, Entrer en relation avec Isvara

[5] Article en pdf, Tout sur la grâce

[6] Acheter ce livre de Swami Dayananda sur Amazon