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Livres de Vedanta en français de Swami Dayananda Saraswati

 

De nombreuses personnes nous demandent régulièrement si les livres de notre enseignant, Swami Dayananda Saraswati, ont été traduits et publiés en français.

Nous sommes heureux de vous annoncer que l’éditeur de Swamiji, Arsha Vidya Publications, nous a autorisé à publier en français une dizaine de titres de Pujya Swamiji.

Voici les cinq premiers titres. Pour voir une description détaillée et les commander, cliquer sur ce lien.

Ouvrages de Swami Dayananda Saraswati:

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ouvrage de Swami Viditatmananda Saraswati:

Ce dernier titre est de l’un des disciples les plus anciens de Pujya Swamiji, Swami Viditatmananda Saraswati (Adhyatma Vidya Mandir, Ahmedabad, Gujarat) qui nous a aussi donné l’autorisation de publier un de ses livres en français :

 

 

Nous vous remercions de diffuser largement cette information autour de vous pour que ces premiers livres de Swami Dayananda en français puissent être enfin lus dans le monde francophone.

Avec toute notre amitié,
Surya et Neema

Surya Tahora et Neema Majmudar 

Vedanta,Découvrir ce qui est
http://www.discovervedanta.com/french/accueil.htm

 

Transformation et connaissance de soi

A l’occasion de mon passage à l’Ile de la Réunion entre le 22-28 Août 2011, j’ai eu l’opportunité de donner une série de conférences d’Introduction au Vedanta, avec pour titre: L’enseignement de la non dualité (Advaita Vedanta), Une tradition spirituelle pour notre temps

L’une d’entre elles qui a pour thème ‘Transformation et connaissance de soi’ est visible sur Youtube. Elle a été découpée en 4 parties de 30 minutes chacune. La transformation de soi est abordée à deux niveaux.

Relatif avec la découverte du grand ordre des choses que présente le Vedanta et ses implications sur la manière dont nous pouvons vivre notre vie, en tant qu’individu relié au tout, éveillé à la présence de cet ordre qui imprègne l’ensemble de l’univers à différents niveaux (physique, biologique, psychologique, épistémologique, etc.)

Le niveau absolu (la vision de l’Un non duel, libre de toute limitation que nous sommes en réalité, dépassant en cela la relation individu/tout) est abordé en fin de conférence dans les parties 3 et 4 qui inclut un dialogue avec les participants.

La nature du temps: Physique & Vedanta

De façon générale, nous méditons sur le temps sans trop savoir à quel type d’objet nous avons affaire. Le temps est-il un objet naturel, un aspect des processus naturels, un objet culturel? Est-ce parce que nous le désignons par un substantif que nous croyons abusivement à son caractère d’objet? Qu’est-ce donc qu’indiquent vraiment les horloges quand nous disons qu’elles donnent l’heure ? Est-ce parce que nous sommes capables de mesurer le temps que de nombreuses locutions familières suggèrent que le temps est un objet physique? Mais l’idée que nous avons du temps est-elle un fidèle décalque de la réalité? En temps qu’objet de réflexion, ne se ramène-t-il pas plutôt à une représentation forgée par l’individu?

Ce sont là quelques unes des questions sur la nature du temps qu’évoquent un article d’Etienne Klein intitulé ‘Le temps de la physique’ et une série d’entretiens vidéo d’Etienne Klein intitulée ‘Le temps existe-t-il ?’ (1/4   Définition du temps ; 2/4  Les ingrédients du temps ; 3/4 La réalité du temps ; 4/4 Le temps et la foi ).

Etienne Klein est physicien et docteur en philosophie des sciences. Il dirige le Laboratoire de recherches sur les sciences de la matière du CEA (Commissariat à l’Energie Atomique),

L’article d’Etienne Klein intitulé ‘Le temps de la physiquecommence par souligner le fait malgré sa familiarité apparente, l’expérience que chacun de nous en fait et les tentatives de définition qu’on peut lui donner, ‘le mot temps se perd dans les brumes dès qu’on veut en saisir le contenu’.

En dépit de son allure familière, le temps suscite des impasses et des paradoxes de toute sorte, dont le nombre semble grandir avec la pénétration du regard. La première difficulté, déjà repérée par saint Augustin, est que le mot temps ne dit pratiquement rien de la chose qu’il est censé exprimer. Le mot temps désigne – en apparence – l’objet d’un savoir et d’une expérience immédiats, mais il se perd dans les brumes dès qu’on veut en saisir le contenu. Bien sûr, on peut tenter de définir le temps : dire qu’il est ce qui passe quand rien ne se passe ; qu’il est ce qui fait que tout se fait ou se défait ; qu’il est l’ordre des choses qui se succèdent ; qu’il est le devenir en train de devenir ; ou, plus plaisamment, qu’il est le moyen le plus commode qu’a trouvé la nature pour que tout ne se passe pas d’un seul coup. Mais toutes ces expressions présupposent ou contiennent déjà l’idée du temps. Elles n’en sont que des métaphores, impuissantes à rendre compte de sa véritable intégrité.

Il souligne ensuite comment le temps ne peut être appréhendé et observé comme nous le faisons pour un objet ordinaire en mettant une distance entre lui et nous, car ‘nous sommes inexorablement dans le temps’.

La troisième difficulté que nous avons par rapport au temps est que ‘le temps n’est une  » matière  » à aucun de nos cinq sens. Il n’est pas perceptible en tant que phénomène brut.’

Et il y a aussi ‘le paradoxe, et même le prodige, de la réalité du temps’ :

Puisque le passé n’est plus, que l’avenir n’est pas encore, puisque le présent lui-même a déjà fini d’être dès qu’il est sur le point de commencer, comment pourrait-on concevoir un être du temps? Comment pourrait-il y avoir une existence du temps si le temps n’est ainsi composé que d’inexistences? De fait, le temps est toujours disparaissant. Son mode d’être est de ne pas être.

La suite de l’article explore de manière concise (et parfois technique pour un lecteur non scientifique ) le temps des physiciens, en débutant par ces réflexions,

Les scientifiques de toute discipline sont confrontés au temps. Je parlerai surtout des physiciens. Il peut sembler curieux d’associer le temps et la physique. Celle-ci cherche en effet, sans se l’avouer toujours, à éliminer le temps. Le temps est associé au variable, à l’instable, à l’éphémère, tandis que la physique, elle, est à la recherche de rapports qui soient soustraits au changement. Lors même qu’elle s’applique à des processus qui ont une histoire ou une évolution, c’est pour y discerner soit des substances et des formes, soit des lois et des règles indépendantes du temps. Dans son désir d’accéder à un point de vue quasi divin sur la nature, la physique prétend à l’immuable et à l’invariant. Mais dans sa pratique, elle se heurte au temps. Reprenons la métaphore classique comparant le temps à un fleuve qui coule. Elle évoque les notions d’écoulement, de succession, de durée, d’irréversibilité. Ces symboles font partie du questionnement des physiciens. Est-il question d’écoulement? Les physiciens se demandent si l’écoulement du temps est élastique ou non. La physique classique, sur ce point, ne répond pas comme la relativité. Est-il question de durée? Les cosmologistes, quant à eux, aimeraient savoir si le temps a eu un début et s’il aura une fin. Enfin, à l’instar du fleuve, le temps a un cours : il s’écoule inexorablement du passé vers l’avenir (ce cours irréversible n’est pas un caractère du temps parmi d’autres caractères, il est la temporalité même du temps). Mais qu’en est-il des phénomènes qui se déroulent dans le temps, s’interrogent les physiciens? Leur sens peut-il ou non s’inverser?

La conclusion de l’article est limpide et étonnante à la fois,

De fait, les physiciens sont parvenus à faire du temps un concept opératoire sans être capables de définir précisément ce mot.

…chacun des systèmes conceptuels de la physique donne au temps un statut original et particulier. Il n’y a visiblement pas d’universalité du concept de temps, ni d’unité théorique autour de lui.

La nature du temps semble ainsi échapper, selon leur propre aveu, à toute appréhension catégorique de la part des physiciens. C’est là une conclusion remarquable basée sur l’intégrité caractéristique de la démarche des scientifiques dans leur exploration de l’univers et de l’espace-temps.

Si l’on interroge le Vedanta à ce propos, il parvient par des moyens différents à une conclusion étonnamment similaire au sujet du temps et de manière plus générale à l’univers. En effet selon le Vedanta, l’univers et donc l’ensemble des phénomènes de l’univers ainsi que le temps et l’espace qui en forment le cadre sont mithya en termes de réalité. En d’autre termes, le Vedanta affirme que cet univers à qui nous attribuons une réalité absolue, tangible solide, et comme étant la seule et unique réalité ne l’est pas quant on l’examine plus en avant. L’univers (et le temps) sont mithya.

Mithya est un terme ontologique traduisant notre compréhension de la réalité des choses et qui signifie ‘satasatbhyam anirvacaniyam’, c’est à dire cela qui ne peut être défini de manière définitive ou catégorique comme étant sat, réellement existant, existant par lui-même, absolument réel ; on ne peut pas non plus affirmer que cela est asat, non existant, comme le fils d’une femme stérile ou les cornes d’un lièvre, un cercle carré pour reprendre les exemples traditionnels du Vedanta.

Ce qui est mithya se situe donc entre la non existence (asat) et la réalité absolue (sat); c’est un ‘entre-deux’ qui est celui de la réalité empirique, transactionnelle, gouvernée par des lois que découvre la science, et qui constitue le champ commun d’interaction et d’expression des êtres humains.

Swami Dayananda Saraswati, un enseignant traditionnel du Vedanta, dit que dés que l’on analyse le temps, on se rend compte il n’y a en réalité ni passé ni futur mais seulement le présent,

Le passé ne peut pas être pensé dans le passé. Il ne peut être pensé que dans le présent. Ainsi, le passé est une pensée au présent. Le futur lui aussi ne peut être pensé que dans le présent. Le passé était ‘présent’, le futur sera ‘présent’ et bien entendu, le présent est ‘présent’.

S’il en est ainsi, si le présent semble être indissociable du temps, quelle est la nature du présent ? Quand nous disons le présent, que voulons-nous indiquer exactement par ce mot? Généralement, c’est pour nous un intervalle ou un moment entre deux évènements, dont la longueur varie en fonction de notre perspective. Swami Dayananda Saraswati poursuit à ce sujet et dit que,

Le présent peut être réduit au kalpa (au cycle) présent, au millénaire présent, au siècle présent, à la décennie présente, à l’année présente, et encore plus en avant l’heure présente, la minute, la seconde, une microseconde, etc. Et tout ceci peut être divisé plus en avant ou réduit mathématiquement à l’infini.

Si le présent qui est la nature du temps se dérobe à nous quand on tente de le saisir, et se perd dans l’infini d’une régression mathématique, peut-on toujours affirmer qu’il est sat ? Non, il est mithya en termes de réalité. Tout comme le pot d’argile qui n’est qu’un nom pour un objet qui certes a une utilité et une réalité empirique mais n’a pas de réalité indépendamment de l’argile, le temps est mithya. Le temps n’est qu’un nom ou un ‘concept opératoire’ qui dépend pour son existence du Soi, de l’Etre-Conscience, que révèle le Vedanta avec l’aide d’une méthodologie d’enseignement précise et systématique. Swami Dayananda Saraswati résume en quelques mots cette relation en disant que,

Sans la présence de la Conscience, il n’y a pas de temps. Qu’est-ce donc que le présent ? Cette Conscience seule est le présent. Le présent ‘est’. La vérité du temps est la Conscience libre du temps, l’éternité. L’éternité n’est pas dans le temps. Le temps non éternel est soutenu par la Conscience éternelle, libre du temps. En réalité, il n’y a pas de temps. Ce qui est ici est uniquement la Conscience libre du temps. Le temps dépend entièrement pour son existence de la Conscience ou sat chit ananda, l’Etre-Conscience dépourvu de toute limitation. C’est cela qui est la réalité de toute chose, et la réalité du temps.

Quelques vidéos avec Etienne Klein

1. Rencontre avec Etienne Klein, sur le temps

2. Le temps est-il une illusion? – Marc Lachièze-Rey, Étienne Klein

Pour en savoir plus sur le Vedanta

1. Voir les vidéos 11 et 12 de la série de 23 vidéos sur l’enseignement de la Bhagavad Gita par Neema Majmudar disponible sur Youtube.

Vidéo 11 :Qu’est ce que la réalité?

Vidéo 12: Je suis Etre Conscience illimitée

2. Sur le site ‘Le Vedanta, Découvrir ce qui est’

Voir les pages Les ordres de réalité; La nature du soi

St Augustin, les Confessions, sur le temps

Comme le dit Etienne Klein, Saint Augustin exprime lui aussi sa perplexité devant l’impossibilité de mettre le doigt sur la réalité du temps et sur son mode d’être, et en conclut que le passé et le futur ne peuvent se définir que relativement au présent, qui seul semble avoir une réalité.

Qu’est-ce donc que le temps? Si personne ne me le demande, je le sais; mais que je veuille l’expliquer à la demande, je ne le sais pas! Et pourtant – je le dis en toute confiance – je sais que si rien ne se passait, il n’y aurait pas de temps passé, et si rien n’advenait, il n’y aurait pas d’avenir, et si rien n’existait, il n’y aurait pas de temps présent.

Mais ces deux temps, passé et avenir, quel est leur mode d’être alors que le passé n’est plus et que l’avenir n’est pas encore? Quant au présent, s’il était toujours présent sans passer au passé, il ne serait plus le temps mais l’éternité. Si donc le présent, pour être du temps, ne devient tel qu’en passant au passé, quel mode d’être lui reconnaître, puisque sa raison d’être est de cesser d’être, si bien que nous pouvons dire que le temps a l’être seulement parce qu’il tend au néant. […]

Enfin, si l’avenir et le passé sont, je veux savoir où ils sont. Si je ne le puis, je sais du moins que, où qu’ils soient, ils n’y sont pas en tant que choses futures ou passées, mais sont choses présentes. Car s’ils y sont, futur il n’y est pas encore, passé il n’y est plus. Où donc qu’ils soient, quels qu’ils soient, ils n’y sont que présents. Quand nous racontons véridiquement le passé, ce qui sort de la mémoire, ce n’est pas la réalité même, la réalité passée, mais des mots, conçus d’après ces images qu’elle a fixées comme des traces dans notre esprit en passant par les sens. Mon enfance par exemple, qui n’est plus, est dans un passé qui n’est plus, mais quand je me la rappelle et la raconte, c’est son image que je vois dans le présent, image présente en ma mémoire.
En va-t-il de même quand on prédit l’avenir? Les choses qui ne sont pas encore sont-elles pressenties grâce à des images présentes ? Je confesse, mon Dieu, que je ne le sais pas. Mais je sais bien en tout cas que d’ordinaire nous préméditons nos actions futures et que cette préméditation est présente, alors que l’action préméditée n’est pas encore puisqu’elle est à venir. Quand nous l’aurons entreprise, quand nous commencerons d’exécuter notre projet, alors l’action existera mais ne sera plus à venir, mais présente. […]

Il est dès lors évident et clair que ni l’avenir ni le passé ne sont et qu’il est impropre de dire: il y a trois temps, le passé, le présent, l’avenir, mais qu’il serait exact de dire: il y a trois temps, un présent au sujet du passé, un présent au sujet du présent, un présent au sujet de l’avenir. Il y a en effet dans l’âme ces trois instances, et je ne les vois pas ailleurs: un présent relatif au passé, la mémoire, un présent relatif au présent, la perception, un présent relatif à l’avenir, l’attente. Si l’on me permet ces expressions, ce sont bien trois temps que je vois et je conviens qu’il y en a trois”.

Saint Augustin, Confessions, trad. E Khodoss, livre XI, § XIV, XVIII et XX.